Après 32 ans de pratique, je pars à Okinawa pour découvrir les dojos de karaté et de kobudo avec trois amis. Nous sommes allés dans 4 dojos différents pendant ces deux semaines de voyage. Entraînements matin et soir.

1-Le dojo de Nago

Les cours sont animés par Senseï Hirotasu Uechi, 5e dan Uechi-ryu, dans un vrai vieux dojo qui est resté dans son jus depuis plusieurs générations, car c’est son grand-père Kanseï Uechi, frère de Kaneï, qui enseignait dans ce même dojo. Nous étions un bon petit groupe de 20 personnes, dont une grande partie de la famille Hirotasu Uechi (frères,oncles, enfants) et des élèves habituels. Le cours est vraisemblablement toujours le même avec junbi undo exécuté avec rapidité. Puis nous avons pratiqué le hojo undo, dans la même dynamique, où chaque coups et blocages sont réalisés avec rapidité et détermination. Suite à cette séquence, nous avons effectué Sanchin trois fois où Hirotasu et deux anciens réalisaient les contrôles. Il y avait 3 lignes et nous faisions la queue pour passer devant la personne qui nous contrôlait. Une fois fait, nous changions de ligne pour un nouveau contrôle.

A la suite de Sanchin, nous avons fait kote kitae. Ils nous disent qu’ils mettent beaucoup d’importance au kote shine pour travailler la stabilité de la position et pour bien échauffer les avants bras avant les frappes. Kote shime est le fait de frotter les deux avant-bras en donnant un coup de poing en direction du visage du partenaire et de ramener son bras en position sanchin. Puis on enchaîne avec les yakusoku dan kumité, les katas et l’application de Seisan. En fin de séance, il y a possibilité pour ceux qui veulent de passer pour présenter un kata au choix devant tout le monde. Cela permet d’avoir des conseils pour la bonne exécution.

Au Nago dojo, il y a cours deux fois par semaine, le mardi et le jeudi.

2-Le dojo de Naha

Senseï Shimabukuro Haruyoshi, 8e dan Uechi-ryu, possède un très grand dojo à l’étage d’un bâtiment où nous sommes accueillis sur fond musical. La musique est présente tout le long du cours mais l’intensité de la pratique efface rapidement ce fond sonore. Le cours est intense avec un échauffement de séries de coup de pied qui n’en finissent pas. Ensuite et suivant les séances, nous travaillons des enchaînements au sac avec intensité, puis à deux tout en gardant de l’intensité durant la séance, pour finir par les katas réalisés 4 fois chacun. Nous découvrons deux katas de base, les fukyu katas, l’un Shorin-ryu et l’autre Goju-ryu. Le 3e fukyu kata est Kanshiwa. Ils sont enseignés en milieu scolaire. Senseï Shimabukuro est en lien avec deux groupes du Uechi-ryu qui sont Kenyukaï (Dojo de Kadena qui n’existe plus- Shinjo Senseï) et Shubukan (Association de Futenma – Famille Uechi).

Son enseignement est orienté vers le kumité. Senseï Shimabukuro a l’habitude de recevoir des touristes venant essayer le Uechi-ryu, et est très attentionné dans sa pédagogie pour adapter des exercices afin que tous les participants puissent repousser leurs limites physiques. Les élèves arrivent tout au long du cours, il y a une liberté dans le fait de venir quand on peut et repartir quand on veut. Les cours sont exigeants physiquement mais après deux semaines à Okinawa, je peux dire qu’on repart en pleine forme. Il y a cours tous les soirs de la semaine.

3-Le dojo de Futenma

Dojo du Soké, héritier de la maison mère du Uechi-ryu. Senseï Sanadao Uechi 4e génération, souvent appelé Kansho Uechi, vient de reconstruire son dojo ainsi que sa maison qui se situe au-dessus. Ce dojo est tout neuf avec un très beau parquet et deux grands miroirs qui amènent une bonne visibilité lors de l’exécution du kata Sanchin devant Senseï Uechi. J’ai pu pratiquer avec deux de ses trois fils qui ont une vingtaine d’année, et Haruki san et Tomo san. Haruki san était élève de Kanmei, il a eu son 1er dan en 1997. Comme vous pouvez le constater, c’est un dojo où peu de personnes viennent s’entraîner. Ceci est sûrement lié à la distance qui le sépare de Naha city d’où il faut près d’1heure30 de bus pour venir. En voiture, il faut compter environ 40 minutes. Le cours commence torse nu pour effectuer le kata Sanchin trois fois. D’abord une fois en groupe, puis ensuite un par un, pour être contrôlé au niveau de la technique et du kitae kata. Après, nous avons le droit à une petite pause. Toutes les séquences d’ailleurs sont entrecoupées de pause pour boire un peu d’eau et prendre un petit bonbon sucré salé. Après nous enchaînons avec l’échauffement junbi undo, puis kote kitae qui est très apprécié par les pratiquants du dojo pour démontrer leur capacité à encaisser des coups puissants. Vous pouvez demander moins fort au besoin, de toute façon ils sont généralement toujours dans la bienveillance. Après on continue avec les fukyu katas, ceux enseignés dans le milieu scolaire vue dans le dojo de Shimabukuro Haruyoshi Senseï. Puis tous les katas de notre école Uechi, exécutés trois fois. Après chacun passe un par un pour effectuer un kata sous l’œil avisé de Senseï Uechi et être corrigé sur la bonne technique, avec une dimension très géométrique de la posture. Chaque technique est posée et doit être très carrée pour avoir un rendu esthétique. Le cours se finit par le salut et une photo de groupe comme dans tous les autres dojos.

A Futenma, il y a 2 cours par semaine, le lundi et le vendredi. Quand Sanadao Uechi Senseï ne peut pas venir faire le cours à cause de son travail ou est en déplacement à l’étranger, c’est Haruki san qui prend le relais.

4-Le dojo du Koburyu

Dojo situé à Naha où vous pouvez retrouver senseï Kinjo, 10e dan karaté et 10e dan Kobudo. En 2000, il a créé son école à partir du Uechi-ryu de Itokazu Seiki et du kobudo de Matayoshi Shinpo. Son expertise est très intéressante. Senseï Kinjo ainsi que sa femme Masami Senseï 9e dan expliquent tous les mouvements techniques que l’on trouve dans les hojo undo et katas. Il a une conception de la pratique où on doit toujours rechercher le côté naturel de la posture pour appliquer au mieux chaque technique avec puissance et relâchement. Le yori ashi est le maître mot dans sa pratique du kobudo et du karaté. A 85 ans, il garde une grande vivacité et une grande précision pour attaquer sur les zones dites « kyusho ». Le dojo est assez petit, pas toujours évident pour réaliser les katas de kobudo avec le bo ou par exemple le nunchaku, mais on y arrive. Chaque arme à sa façon d’être manipulée mais les principes restent les mêmes. Pour approfondir notre pratique, Kinjo Senseï nous détaille les subtilités de toutes les armes (bo, tonfa, saï, nunchaku, tinaka, eku). Il nous explique également comment la pratique et l’enseignement des arts martiaux se faisaient autrefois. Il porte beaucoup d’importance à nous cultiver sur l’historique du karaté et du kobudo d’Okinawa. Le cours est plaisant et remplit d’humour. Il nous résume ainsi son école : « self-défense ; entraînement, encore et toujours ; et prendre plaisir dans la pratique »

Il y a possibilité de prendre un cours par jour sur réservation.

Pour conclure, chaque dojo est différent. Le lieu, et surtout le senseï, donnent l’énergie du dojo en y partageant son enseignement. Les dojos dans l’ensemble sont assez vides, je pense qu’ils comptent sur nous européens et américains en grande partie, pour continuer la pratique et l’enseignement, ceci afin de transmettre leur art.

Notre voyage était en mars avec une moyenne de température de 22 degrés. C’était une température idéale pour visiter Okinawa et profiter de la plage où on pouvait se baigner dans une eau autour de 21 degrés. Au plaisir de revoir tous ces Senseïs.

Shimabukuro H. Senseï et son fils Daïki viendront fin mai en France pour animer des stages autour de notre évènement annuel : la coupe de France Uechi-ryu.

Article de Lazare POUCHARD.